Le noir ronronne
Du frigo de la fournaise
des respirations
en bulles tranquilles
une fleur se dessine
sous les draps
rampe dans les fibres
du pyjama
nounours est trempé
avalé du sable
léché les vitres de sa voiture
craché des épinards sur le chat
perdu une mitaine
arraché ses lunettes
et maman m’aime toujours
Moi à genoux
Dans le coin de ma chambre
Ma gomme
Dans les cheveux de Sylvie
J’ai embrassé mon père
Qui a embrassé ma sœur
Qui a poussé mon frère
Qui m’a mordu
Je joue au lion sous la bassinette
Les barreaux baissés
Rugir sans contrainte
Mon frère apporte
un bol d’eau que je m’empresse de renverser
d’un coup de patte
J’ai inventé un jeu compliqué
Avec une corde à danser et des pions
Les règles sont variables
À mon avantage
Et tout le monde est fâché
Le ballon a rebondi sur mon nez
J’ai pleuré fort
par la bouche
Il y a un nid au milieu de mon assiette
Une voiture dans ma fourchette
Une cuillérée d’infâme purée dans mon garage
Comme je suis bête
D’avaler ces sornettes
J’ai demandé crié supplié que la lumière reste ouverte
J’ai peur des loups dans les rideaux
Des monstres tapis
et de grand-mère quand elle ronfle
Demain au parc avec l’école
Défense de nourrir les écureuils de courir de se chamailler de manger de la neige
Je serai en retenue en plein air
Bill est tombé en patin
J’ai dessiné sur son plâtre
Un bâton de hockey avec des dents
Pour le consoler d’avoir perdu
Ses palettes
L’angoisse d’un arbre qui pousse
Dans l’estomac
J’ai avalé tout rond sans faire exprès
des pépins de pomme
Si c’est A c’est B pour bien
Si c’est B c’est C pour correct
Si c’est C c’est D pour désolant
Si c’est D c’est E pour épouvantable
Une note que je ne mérite pas
Comme une fenêtre sur mon palais
Une fausse carie de sorcière
Un désennui pour ma langue
Un courant d’air pour mes paroles
Un trou
dans mon sourire
Je me suis étendu sur l’asphalte
Au milieu de la rue
Juste pour voir
Aucun souvenir du ciel
Quatre secondes
De peur pure